sûreté ni pureté à espérer pour la doctrine de la vertu.
Un moraliste populaire peut bien se contenter d’invoquer
un certain sentiment, que l’on désigne sous le
nom de sentiment moral, à cause de l’effet que l’on en
attend, lorsque, pour reconnaître si une certaine action
est ou non un devoir de vertu, il se pose cette question :
« Si chacun prenait en tout cas ta maxime pour
loi générale, resterait-elle d’accord avec elle-même ? »
Mais si le sentiment seul nous faisait un devoir de
prendre ce principe pour critérium, ce devoir ne serait
plus dicté par la raison ; ce ne serait plus qu’une sorte
d’instinct, et par conséquent quelque chose d’aveugle.
Dans le fait il n’y a point de principe moral qui se fonde, comme on se l’imagine, sur un sentiment ; celui dont nous venons de parler n’est autre chose en réalité qu’une vague conception de cette métaphysique qui réside au fond de la raison de chaque homme. C’est ce qu’aperçoit aisément le maître qui cherche à instruire son élève, suivant la méthode socratique[1], sur l’impératif du devoir, et sur l’application de ce concept à l’appréciation morale de ses actions. — Il n’a pas besoin pour cela d’exposer ce concept (d’en faire la technique) d’une manière toute métaphysique, et de parler toujours un langage scolastique, à moins qu’il ne veuille faire de son élève un philosophe. Mais il faut que la pensée remonte jusqu’aux éléments de la métaphysique, sans quoi il n’y a ni sûreté, ni pureté, ni même aucune espèce d’influence à espérer pour la doctrine de la vertu.
- ↑ Der socratisch zu katechisiren versucht.