et c’est ici qu’il faut appliquer cette modération, que l’on a coutume de recommander dans la pratique même des vertus (insani sapiens nomen ferat, æquus iniqui, ULTRA QUAM SATIS EST virtutem si pelat ipsam. Horat.). Autrement il faudrait dire, ce qui est absurde, que l’on peut être trop sage, trop vertueux. L’affection appartient toujours à la sensibilité, quel que soit l’objet qui l’excite. La vraie force de la vertu est la tranquillité d’âme[1], avec la résolution réfléchie et ferme de pratiquer la loi morale. C’est là ce qui constitue l’état de santé dans la vie morale ; l’affection au contraire, même quand elle est excitée par la représentation du bien, est un phénomène qui ne brille qu’un instant et laisse après lui la fatigue. — Celui-là encore ne possède qu’une vertu fantastique, qui n’admet point de choses indifférentes (adiaphora) à la moralité, qui jonche tous ses pas de devoirs, comme d’autant de chausses-trapes, et qui ne trouve pas insignifiant que l’on se nourrisse de viande ou de poisson, de bière ou de vin, quand on se trouve bien de l’un et de l’autre. Introduire de telles minuties[2] dans la doctrine de la vertu, c’est en faire dégénérer l’empire en tyrannie.