Se faire du bien à soi-même autant qu’il est nécessaire pour trouver du plaisir à vivre (soigner son corps, pourvu que ce soin n’aille pas jusqu’à la mollesse), est un devoir envers soi-même. — Le contraire de ce devoir est de se priver, par avarice (sordidement) ou par une discipline exagérée de ses penchants naturels (par fanatisme), de la jouissance des plaisirs de la vie ; dans l’un et l’autre cas, l’homme viole son devoir envers lui-même.
Mais comment peut-on exiger comme un devoir de tous ceux qui ont les moyens nécessaires pour cela, outre cette bienveillance[1] qui consiste à souhaiter du bien aux autres hommes (et qui ne nous coûte rien), la pratique même de la bienveillance, c’est-à-dire la bienfaisance[2] à l’égard de ceux qui sont dans le besoin ? — La bienveillance est le plaisir que nous trouvons dans le bonheur (dans le bien-être) d’autrui ; la bienfaisance est la maxime qui consiste à se proposer pour but ce bonheur, et le devoir de la bienfaisance est l’obligation que la raison impose au sujet, de prendre cette maxime pour loi générale.