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DEVOIRS ENVERS LES AUTRES HOMMES.

Il n’est pas évident de soi-même qu’une telle loi en général réside dans la raison ; la maxime : « Chacun pour soi, Dieu (la fortune) pour tous, » semble être plus naturelle.


§ 30.


C’est le devoir de tout homme d’être bienfaisant, c’est-à-dire d’aider, suivant ses moyens, ceux qui sont dans la misère à en sortir, sans rien espérer en retour.

En effet tout homme qui se trouve dans le besoin souhaite d’être secouru par les autres. Mais, s’il adoptait pour maxime de ne point secourir les autres à son tour lorsqu’ils seront dans le besoin, ou s’il faisait de la bienfaisance une loi générale facultative[1], alors chacun lui refuserait, ou du moins serait autorisé à lui refuser également son assistance dans le besoin. Cette maxime de l’intérêt personnel se contredit donc elle-même lorsqu’on l’érige en loi universelle, c’est-à-dire qu’elle est contraire au devoir. Par conséquent la maxime de l’intérêt commun qui veut qu’on fasse du bien à ceux qui sont dans le besoin est un devoir général pour les hommes ; car, par cela même qu’ils sont des hommes, ils doivent être considérés comme des êtres raisonnables sujets à des besoins et réunis par la nature dans une même demeure pour s’aider réciproquement.

  1. Zum allgemeinen Erlaubnissgesetz.