Page:Karamsin - Histoire de l'empire de Russie, Tome XI, 1826.djvu/240

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par le poison ; mais les circonstances et le genre de sa mort ne semblent point confirmer cette assertion. Ce tendre père de famille, cet homme d’un caractère si énergique, pouvait-il, se sauvant du malheur par le poison, abandonner lâchement sa femme et ses enfans à une perte presque inévitable ? Et d’ailleurs, le triomphe de l’usurpateur était-il assuré, lorsque l’armée ne trahissait point encore de fait son Souverain, et, quoique sans dévouement, se trouvait encore sous ses drapeaux ? Ce ne fut que la mort de Boris qui décida le succès de l’Imposteur ; des traîtres seuls pouvaient désirer, et vouloir hâter cette mort. Mais il est plus vraisemblable que ce fut un coup d’apoplexie, et non le poison, qui termina les jours orageux de Boris. Véritable calamité pour la patrie, car cette mort prématurée fut une punition du ciel, plus encore pour la Russie que pour Godounoff : comme en récompense de ses bienfaits politiques, il mourut du moins sur le trône et non dans les fers d’un Diacre fugitif ; et la Russie, perdant en lui un Souverain sage et éclairé, devint la proie du crime pour bien des années.