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George Sand resta invariablement à Nohant et ne le quitta point jusqu’au mois de décembre 1849[1].

Mais Mme Sand tomba de Charybde en Scylla. La réaction s’en donnait à cœur joie en Berry, « dans ce Berry si romantique, si doux, si bon, si calme ». Les « veaux de Delaveau » avaient évidemment réussi non seulement à profiter du mécontentement

    Mme Sand et M. de Tocqueville eut effectivement lieu non le 6 juin, mais le 6 mai.

  1. Elle alla à Paris au commencement de ce mois de décembre 1849, pour assister à la seconde représentation de François le Champi. C’est à ce séjour de décembre 1849 à Paris que se rapporte sa rencontre avec son vieil ami, le célèbre général Pepe, ainsi qu’une rencontre fortuite avec le maréchal de Castellane. Ce dernier écrit dans son Journal à la date du 16 décembre 1849 :
    « 16 décembre 1849. — Dans la même maison que moi loge une Mme Marliani, femme d’esprit, qui reçoit une foule de Libéraux ; elle est fort poHe pour moi et m’a beaucoup engagé à aller chez elle. J’y vais de temps en temps avant de sortir. J’y suis monté ce soir. J’y ai vu une femme paraissant assez jeune ; il n’y avait pas beaucoup de lumière, et je n’ai pu bien voir son visage ; elle fumait une cigarette. Mme Marliani m’a bientôt, en parlant de Maurice de Saxe, dont George Sand descend du côté gauche, fait comprendre que c’était elle. George Sand aussitôt une cigarette finie en prenait une autre. Il y avait là un monsieur de beaucoup d’esprit qu’on appelait « le capitame » et dont je ne sais pas encore le nom. (C’était le capitaine d’Arpentigny, dont nous avons parlé dans notre vol. III. W. K.) Démocrate enragé, il disait que les démocrates étaient les plus forts, mais il s’affligeait, ainsi que George Sand et un autre jeune homme, de leurs divisions en différentes sectes, ce qui les perdrait. Sur ces entrefaites est entré un monsieur assez grand, gras, l’air commun. George Sand s’est avancée vers lui, l’a embrassé en lui disant : « Il y avait longtemps que je ne vous avais vu. » C’était le fameux général Pepe… 1) {Journal du maréchal de Castellane, t. IV, p. 201-202.) C’est à cet épisode aussi que se rapportent les lignes d’une lettre inédite de George Sand à Mazzini, datée du 30 janvier (sans millésime, que même le vicomte de Spoelberch était iudécis de dater de 1849 ou 1850 et que nous pouv ns, à présent, dater en toute conscience de ISôO) : « Le général Pepe est un vieux ami à moi, un homme de bien, je vous assure. Que ses idées aient de l’étroitesse et son caractère de la timidité, je ne le nie pas. On accepte les imperfections de ses amis, mais je n’aurais pas songé à traduire son travail s’il m’eût paru possible que vous y fussiez contredit ou attaqué d’une façon quelconque. J’ai vu Pepe à son retour à Paris dernièrement. Je l’ai trouvé bien changé d’esprit et de santé. Vieux, éteint en apparence, mais voyant bien plus juste, et parlant des rois et des peuples comme jamais je ne l’aurais cru capable de le faire ; cela ressemblait à l’oracle d’un mourant qui voit clair au moment de quitter la vie. « Vous me dites et on me dit qu’il subit des influences fâcheuses, voilà ce que j’ignore. Mais soyez tranquille. Si son œuvre n’est pas ce qu’elle doit être, je m’abstiendrai et lui en dirai franchement et amicalement la raison. « Je n’ai pas le temps de vous écrire aujourd’hui, je vous ai écrit une énorme lettre hier. Je vous embrasse et vous aime de toute mon âme. »