Page:Karenin - George Sand sa vie et ses oeuvres T4.djvu/183

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au lendemain. Il est donc certain que le 2 décembre projeta une certaine lueur sur les jours déjà écoulés et que certains détails y sont annotés et comme soulignés, qui n’auraient pas été remarqués, si le journal avait réellement été écrit au jour le jour.

Certaines données, aussi, font présumer que c’est avec intention que George Sand nota sa maladie et les noms des personnes qu’elle avait fréquentées peu avant le 2 décembre, et dont plusieurs — comme Mme Clotilde Villetard, Mme Rozanne de Curton[1] et le comte d’Orsay — l’aidèrent bientôt de leurs relations, ou grâce auxquelles (c’est le cas de Mme Curton) elle avait déjà depuis longtemps fait la connaissance d’un personnage aussi omnipotent que l’était à ce moment M. de Persigny. Par des lignes de ce genre — qui ont tout l’air d’être insignifiantes — George Sand semble dire aux uns : « Voilà mes relations ; donc je fus toujours en bons rapports avec les personnes appartenant à l’Élysée ! » et aux autres : « Si je me suis adressée plus tard pour mes amis républicains à ces personnes, c’est que déjà avant le triomphe de leur parti elles avaient simplement été mes bons amis… » Ces considérations, et plusieurs autres indices, nous font croire à une certaine préméditation. Mais, quoi qu’il en soit, ce journal est extrêmement intéressant, car on y voit reflétés fidèlement tous les états d’âme de George Sand pendant ces vingt jours : d’abord insouciance complète, puis stupéfaction, puis vague inquiétude, puis chagrin, désespoir, et enfin morne abattement.

Les lecteurs de la Revue de Paris ont lu les pages qui se rapportent au Ier décembre et aux jours suivants[2] ; les lecteurs du volume des Souvenirs et idées, où ce journal fut réimprimé, ont pu lire, aussi, les extraits des pages se rapportant aux jours précédents ; mais comme ce journal y est publié avec des lacunes et force inexactitudes, nous nous permettons de donner ici la reproduction exacte de ses premières pages, telles que nous les avons publiées, peu avant le centenaire de George Sand, dans la revue

  1. Mme Rozanne de Curton, mariée en premières noces à M. Bourgoing, amie de George Sand dès 1829-1830.
  2. V. la Revue de Paris du 15 juin 1904.