Page:Karenin - George Sand sa vie et ses oeuvres T4.djvu/246

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plus j’en profite. Je suis heureux d’aller à la postérité avec vous. Adieu pour le moment.

Votre ami affectionné.

d’Orsay.

Écrivez-moi si vous avez reçu une réponse de L.-N.

Lundi.
Chère madame Sand,

Imaginez comme j’ai été heureux lorsque Lambert[1] m’a apporté votre lettre, car je venais d’écrire à Napoléon[2] pour aller attaquer son cousin (car ils sont réconciliés), il a donc fallu envoyer chez lui pour lui économiser cette campagne. Il est venu chez moi ; je lui ai montré votre lettre, il est charmé que vous soyez satisfaite. Ne vous donnez pas la peine de remercier, je dois voir L. N. dans quelques jours ; je lui dirai ce qu’il faudra lui dire de votre part, ni plus ni moins. Il paraît que votre fille est à Besançon et que son mari a suivi le mouvement.

Je suis très curieux d’apprendre le résultat de ce carambolage. Je suis bien aise que mon roman soit fini ; j’espère que vous n’oubliez pas de dire dans la préface que vous m’aimez. Je tiens essentiellement à cela, car il y a bien longtemps que j’ai dit à Liszt et à Sue que j’étais convaincu que nous serions un jour grands amis. J’avais vos gravures chez moi et j’étais pétri de l’instinct de notre amitié.

Votre affectionné,

d’Orsay.

Mes amitiés à Manceau.

Mercredi.

Un mot au galop, chère madame Sand, j’ai envoyé votre lettre pour Louis-Napoléon. C’est à son tour cette fois, car hier j’ai dû écrire au président pour un malheureux bon compère du Midi qu’on allait empaqueter. Donc il ne fallait pas trop éperonner toujours du même côté. Je, suis beaucoup mieux et nous avons très bien dîné ici, Émile[3] heureux tout le temps d’avoir à me lire pour le dessert votre admirable lettre. Cabanis en était, comme moi, dans l’enthousiasme, ainsi que les nièces de lady Blessington[4] dont une a traduit ja Mare au diable.

  1. Eugène Lambert.
  2. C’est-à-dire le prince Napoléon-Jérôme.
  3. Émile Ollivier.
  4. La célèbre amie de d’Orsay, lady Blessington, fut en son temps une beauté remarquable et une élégante de haute lice, puis la première éditrice des « keepsakes » et d’albums de beauties. Elle fit un livre sur Byron qu’elle avait beaucoup connu et écrivit quelques romans médiocres. Son salon, tant en France qu’en Angleterre, était des plus brillants. Elle ne survécut pas à sa ruine, ne put se consoler de vieillir et mourut en 1849 subitement, — on présume que ce fut un suicide.