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Page:Karenin - George Sand sa vie et ses oeuvres T4.djvu/34

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dement l’édifice grandiose des droits et des libertés du peuple, et, qu’après cela, le renouveau social marcherait aussi d’un pas franc et alerte. Telles furent les premières impressions de George Sand. Durant les premiers jours de la révolution ses lettres sont remplies d’exclamations, d’espérances et de descriptions enthousiastes. Ses articles datant de cette lune de miel de la République sont également pleins de foi courageuse, même de téméraire confiance : tout était fait, à de petites exceptions près, tout le peuple était pour les meneurs de la révolution. Il est fort aisé aux personnes se trouvant au milieu des délibérations des leaders de partis, de tomber dans cette erreur.

À ce moment, le présent et l’avenir apparaissent à George Sand sous les couleurs les plus roses ; elle en parle en des termes d’ode triomphale, sous l’impression de la proclamation de la République qui eut lieu le 27 février.

Voici ce qu’elle écrit à Mlle Augustine Brault, laissée à la Châtre sous la garde de Mme Eugénie Duvernet :

… J’ai vu tout le monde. Louis Blanc, en son palais du Luxembourg, me demandait ce soir de tes nouvelles ; il persiste à t’appeler Mlle Graffenried. J’ai vu passer le cortège ce matin de la fenêtre de Guizot, tout en causant avec Lamartine. Il était beau, simple et touchant (le cortège), quatre cent mille personnes pressées depuis la Madeleine jusqu’à la colonne de Juillet ; pas un gendarme, pas un sergent de ville, et cependant tant d’ordre, de décence, de recueillement et de politesse mutuelle qu’il n’y a pas eu un pied foulé, pas un chapeau cabossé. C’était admirable. Le peuple de Paris est le premier peuple du monde !

Elle écrit à la même le 5 mars[1] :

… J’ai vu Mazzini, Combes, mes connaissances de Genève. Toute la terre est à Paris, et pendant ce temps-là, il y a des belles dames qui s’enfuient sous des déguisements et qui se croient aux jours de la Terreur, lorsque personne ne pense à elles…

… J’aurais bien des choses à te raconter. Tout va ici aussi bien que possible. Le gouvernement est bon et honnête, le peuple excellent. La bourgeoisie a peur et fait semblant d’être enchantée. L’Europe

  1. Nous avons cité une partie de cette lettre dans le chapitre vi. Elle est également inédite.