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Page:Karenin - George Sand sa vie et ses oeuvres T4.djvu/533

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passage à Paris, elle tomba malade et fut si longtemps souffrante que ce n’est que le 10 janvier 1867 qu’elle arriva chez ses enfants. Depuis ce moment Nohant redevint sa résidence habituelle. Maurice, et surtout Lina, la supplièrent de ne plus retourner à Palaiseau, ne pouvant supporter l’idée qu’elle pût retomber malade toute seule, privée des soins de ses proches, car l’état de sa santé était devenu chancelant depuis son typhus de 1860, et elle souffrait souvent d’étranges attaques entéro-gastriques. Ce furent, hélas ! les symptômes ds la maladie qui l’emporta plus tard. Mme Sand vendit sa maisonnette de Palaiseau, deux ans plus tard. Elle écrit à Flaubert le 9 janvier 1867, de Paris :

Cher camarade.

Ton vieux troubadour a été tenté de claquer. Il est toujours à Paris. Il devait partir le 25 décembre ; sa malle était bouclée, ta première lettre l’a attendu tous les jours à Nohant.

Enfin le voilà tout à fait en état de partir et il part demain matin avec son fils Alexandre, qui veut bien l’accompagner. C’est bête d’être jeté sur le flanc et de perdre pendant trois jours la notion de soi-même et de se relever aussi affaibli que si on avait fait quelque chose de pénible et d’utile. Ce n’était rien, au bout de compte, qu’une impossibilité momentanée de digérer quoi que ce soit.

Froid, ou faiblesse ou travail, je ne sais pas. Je n’y songe plus guère… Je médite d’aller un peu au Midi quand j’aurai vu mes enfants. Les plantes du littoral me trottent par la tête. Je me désintéresse prodigieusement de tout ce qui n’est pas mon petit idéal de travail paisible, de vie champêtre et de tendre et pure amitié. Je crois bien que je ne dois pas vivre longtemps toute guérie et très bien que je suis. Je tire cet avertissement du grand calme, toujours plus calme, qui se fait dans mon âme jadis agitée…

… La solitude ne te pèse pas. Je pense bien qu’elle n’est pas absolue, et qu’il y a encore quelque part une belle amie qui va et vient, ou qui demeure par là. Mais il y a de l’anachorète quand même dans ta vie et j’envie ta situation. Moi, je suis trop seule à Palaiseau, avec un mort ; pas assez seule à Nohant avec des enfants que j’aime trop pour pouvoir m’appartenir ; et à Paris on ne sait pas ce qu’on est, on s’oublie entièrement, pour mille choses qui ne valent pas mieux que ça…