Un peu plus loin, Mme Adam raconte comment ce même jour, George Sand ayant approuvé l’une des idées que Juliette Adam avait émises et l’ayant embrassée tandis qu’Adam roucoulait et disait des phrases vraiment « sucrées » à sa femme, Maurice l’avait promue de cantinière qu’elle était au grade de lieutenant-colonel.
Ce fut le signal des goguenardises de Maurice qui déclara que puisque la colonelle, lui, le sargent, les fusiliers Plauchut et Planet, même le capitaine marsouin Talma et le pékin Adam avaient pour ainsi dire comme une satisfaction de la conduite de la cantinière Juilliette (on m’appelle « Juilliette »), il la proposait à l’avancement comme lieutenant-colonel…
Nous lisons dans le livre de Mme Adam à propos des farces que les habitués de Nohant se jouaient les uns aux autres, encore ceci :
Dès que l’un de nous est envoyé ici ou là pour chercher quelque chose, il peut être certain qu’on trame une farce contre lui.
Nous nous y prêtons tous avec belle humeur, sauf Adam que les farces horripilent, la nuit surtout quand on le réveille.
Un soir on a mis un coq dans le coffre à bois de notre chambre. Je le savais ; voilà qu’à une heure ou deux, le matin, ce satané coq chante. Adam allume sa bougie.
— Bien sûr ce coq est dans notre cheminée, s’écrie-t-il, mais par où a-t-il passé ?
Alice, dont la chambre donne dans la nôtre, et moi, nous nous cachons sous les draps pour ne pas trop rire bruyamment. Adam continue à regarder dans la cheminée, mais avec prudence, craignant que, passé par le toit, le coq ne lui tombe sur la tête.
Le coq recommence : Cocorico ! Mme Sand, Lina, Maurice, Plauchut, Planet sont derrière la porte, entendent les réflexions d’Adam ; ils le voient se promener en simple costume de nuit, se pencher dans la cheminée. Mais tout à coup, furieux, Adam lance un juron formidable et s’écrie :
— Il est dans le coffre à bois. Je parie que c’est Maurice qui l’y a mis.
Il ouvre le coffre. Le coq, pas content d’avoir été enfermé, lui saute à la poitrine. Nouveau juron, plus violent encore. Il tente d’attraper ce maudit coq, tandis que je m’enfonce de plus en plus sous mes draps. Enfin, le coq, las de voler, se perche sur le bois de la tête du lit d’Adam,