Page:Karenin - George Sand sa vie et ses oeuvres T4.djvu/599

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quelques traits et quelques détails ne trahissaient pas trop leur auteur, nous aurions hésité à l’attribuer à Mme Sand, le caractère de cette Césarine, son impénitence persistante sont choses peu habituelles à la manière de George Sand. Nous avons déjà remarqué que dans certaines œuvres de George Sand de l’avant-dernière et de la dernière période de sa vie on sent une puissante influence du réalisme, qui comptait ses premières victoires.

Le lecteur se rappelle peut-être aussi que nous avions signalé dans Rose et Blanche, Valentine, Pauline, que si George Sand s’était, dès ses débuts, abandonnée à sa propre manière et ne se fût point efforcée de s’approprier « le genre sublime », alors à la mode, elle eût été plutôt une adepte de l’école sobre de Balzac que de l’école romantique et échevelée d’Henri de Latouche. Césarine Dietrich occupe donc une place à part parmi ses derniers romans, et ce qui est surtout remarquable, nous le répétons, c’est que l’héroïne demeure la même jusqu’à la fin, ce qui est contraire à la poétique de George Sand, elle ne devient ni tendre, ni désintéressée, ni moins égoïste. Césarine ne ressemble donc en rien aux autres dames et demoiselles de George Sand transformées par la puissance du vrai amour. Césarine n’aime qu’elle-même. C’est une toute jeune personne, presque une enfant dont la narratrice de cette histoire, une pauvre vieille demoiselle noble, doit faire l’éducation. Césarine est la fille gâtée et capricieuse d’un riche commerçant ; elle n’a plus de mère, et veut non seulement arranger sa propre vie à sa guise, mais encore faire la loi à cette gouvernante, à son père, à tous ses parents et adorateurs. L’aplomb et la suffisance ne lui manquent pas plus que l’adresse et l’habileté à se tirer d’affaire. Elle a toujours le dernier mot, ne se laisse jamais surprendre ni attraper. Sa marche victorieuse à travers la vie rencontre toutefois un obstacle inattendu dans la personne du neveu de sa gouvernante. Ce jeune homme, que Césarine veut compter au nombre de ses adorateurs, décline cet honneur et lui témoigne de l’indifférence. Césarine offensée entreprend une attaque en règle contre le jeune stoïcien, mais le jeune homme la repousse, bien qu’il soit, au fond de l’âme, subjugué par son charme ; il ne veut ni se laisser écarter du droit