Page:Karenin - George Sand sa vie et ses oeuvres T4.djvu/60

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truction publique et une pour le ministère de l’intérieur. Ce qui m’amuse c’est que tout cela s’adresse aux maires, et que tu vas recevoir par la voie officielle les instructions de ta mère.

Ah ! ah ! monsieur le maire, vous allez marcher droit, et pour commencer, vous lirez chaque dimanche un des Bulletins de la République à votre garde nationale réunie. Quand vous l’aurez lu, vous l’expliquerez, et, quand ce sera fait, vous afficherez ledit Bulletin à la porte de l’église. Les facteurs ont l’ordre de faire leur rapport contre ceux des maires qui y manqueront. Ne néglige pas tout cela, et, en lisant ces Bulletins avec attention, tes devoirs de maire et de citoyen te seront clairement tracés. Il faudra faire de même pour les circulaires du ministre de l’Instruction publique. Je ne sais auquel entendre. On appelle à droite, à gauche. Je ne demande pas mieux.

Pendant ce temps, on imprime mes deux Lettres au peuple. Je vais faire une revue avec Viardot, un prologue pour Leckroy. J’ai persuadé à Ledru-Rollin de demander une Marseillaise à Pauline. Au reste, Rachel chante la vraie Marseillaise tous les soirs aux Français d’une manière admirable, à ce qu’on dit. J’irai l’entendre demain.

Mon éditeur commence à me payer. Il s’est déjà exécuté de trois mille francs et promet le reste pour la semaine prochaine ; nous nous en tirerons donc, j’espère. Tu entends bien que je n’ai pas dû demander un sou au gouvernement. Seulement, si je me trouvais dans la débine, je demanderais un prêt, et je ne serais pas exposée à une catastrophe. Tu entends bien aussi que ma rédaction dans les actes officiels du gouvernement ne doit pas être criée sur les toits. Je ne signe pas. Tu dois avoir reçu les six premiers numéros du Bulletin de la République, le septième sera de moi. Je te garderai la collection : ainsi affiche le tiens, et fiche-toi de les voir détruits par la pluie.

Tu verras dans la Réforme d’aujourd’hui[1] mon compte rendu de la fête de Nohant-Vic et ton nom figurera au milieu. Tout va aussi bien ici que ça va mal chez nous. J’ai prévenu Ledru-Rollin de ce qui se passait à la Châtre. Il va y envoyer un représentant spécial Garde ça pour toi encore. J’ai fait connaissance avec Jean Reynaud, avec Barbès, avec M. Boudin, prétendant à la députation de l’Indre ; celui-ci m’a paru un républicain assez crâne, et il est en effet ami intime de Ledru-Rollin. Il nous faudra peut-être l’appuyer. Je crois que les élections seront retardées. Il ne faut pas le dire et il ne faut pas négliger l’instruction de tes administrés. Tu as ton bout de devoir à remplir, chacun doit s’y mettre, même Lambert, qui doit prêcher la République : sur tous les tons aux habitants de Nohant.

  1. Le compte rendu de la fête du 19 mars parut dans la Réforme, comme nous l’avons dit, le 23 mars, ce qui prouve que la lettre est bien du 23 mars.