Page:Karenin - George Sand sa vie et ses oeuvres T4.djvu/601

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braves Lachâtrois avaient déjà une fois reconnu leur bourg bienheureux[1]. L’expérience littéraire et le savoir-faire magistral de l’écrivain, son mépris de tout inutile détail font de ce petit conte une œuvre vraiment classique digne d’être comparée à Werther ou Eermann et Dorothée de Gœthe. Flaubert écrivait à Mme Sand à propos de ce roman :

…Je trouve cela parfait, deux bijoux ! Marianne m’a profondément ému et deux ou trois fois j’ai pleuré. Je me suis reconnu dans le personnage de Pierre. Certaines pages me semblaient des fragments de mes mémoires, si j’avais le talent de les écrire de cette manière. Comme tout cela est charmant, poétique et vrai ! La Tour de Percemont m’avait plu extrêmement. Mais Marianne m’a littéralement enchanté[2]. Les Anglais sont de mon avis, car dans le dernier numéro de l’Athenœum on vous a fait un très bel article. Saviez-vous cela ? Ainsi donc pour cette fois je vous admire pleinement et sans la moindre réserve…

Cette dernière phrase renferme une allusion aux quelques remarques faites par Flaubert et citées plus loin à propos de Flamarande, paru six mois avant. Mais avant d’en parler, ainsi que du tout dernier roman de George Sand, la Tour de Percemoni, aussi vanté par Flaubert, nous devons dire quelques mots d’une série de romans de cette dernière période et de l’avant-dernière période de George Sand, — c’est-à-dire de l’époque décennale de théâtre. — Ils se rattachent les uns aux autres par une idée commune, et traitent le même thème général. Cette série commence par la Filleule écrite en 1853, l’année des Maîtres sonneurs, où l’on voit déjà Brûlette élever l’enfant naturel de la Mariton. Ce thème générai est ceci : Un enfant disparu, enlevé, sauvé et élevé soit par une amie de l’héroïne, soit par un vertueux serviteur, soit par quelque homme du peuple — l’homme du peuple est de rigueur ! L’action se complique tantôt par la faute de la mère, tantôt par une accusation injuste, etc., etc. On trouve des variations sur ce sujet dans la Filleule, dans Narcisse,

  1. Voir plus haut ce qui a été dit à propos de Narcisse et de Jean de la Roche, vol. IT, chap. vin, p. 113, et dans le présent volume, chap. x.
  2. La Tour de Percemont parut dans les livraisons du 1er et 15 décembre et Marianne dans celles du 1er et 15 août 1875 de la Revue des Deux Mondes.