Page:Karenin - George Sand sa vie et ses oeuvres T4.djvu/80

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La réforme sociale, tel est donc l’exercice du devoir du citoyen. Il s’agit de faire succéder le régime de l’égalité au régime de la caste, l’association à la concurrence et au monopole, fléaux distincts dans le principe, fléaux identiques dans ces derniers temps. Il ne s’agit pas d’écrire le principe de l’égalité comme épigraphe à notre nouveau Code, pour qu’ensuite tous les articles du Code en détruisent l’application.

C’est donc un devoir nouveau, un devoir mûri pendant plus d’un demi-siècle, que la République de 1848 implante sur celui qui a été proclamé en 1789…

Puis, démontrant que malgré toute la différence des époques et la prétendue différence entre les partis d’alors et ceux du présent, an fond ce sont toujours les mêmes intérêts égoïstes contre lesquels il faut lutter, George Sand trace d’une manière ferme et concise la limite qui sépare les dangers que couraient jadis les partisans de l’ancien régime et ceux qui menacent, à présent, les ennemis de la liberté. À présent, la révolution étant surtout sociale, ils n’ont rien à craindre ; plus de sang versé, pas de pillage ni de vol ! Ils peuvent être absolument tranquilles là-dessus.

… Alors que craignent-ils ?… L’impôt progressif, l’atteinte portée à l’héritage indirect, les mesures révolutionnaires, les contributions forcées, la socialisation des instruments de travail ; enfin, tous nos besoins, toutes nos infortunes, auxquels il leur faudra porter remède, par de grands sacrifices. Ils craignent de devenir pauvres à leur tour, car ils voient bien que nous ne les laisserons pas jouir en paix d’un luxe qui nous affame et d’une sécurité qui nous expose à mourir de faim.

Et le rédacteur de la Cause du Peuple — socialiste de la plus pure espèce — répond :

Si c’est là ce que vous craignez, vous avez quelque sujet de ne pas dormir bien tranquilles car, certainement, il vous faudra faire des sacrifices. Vous n’avez pas des droits seulement, vous avez de devoirs ; et nous, nous n’avons pas seulement des devoirs, nous avons des droits. C’est vous qui avez profité du passé, vous seuls ! C’est vous aussi qui avez provoqué, par votre entêtement et vos méfiances, la crise où nous sommes, et le présent ne périra pas avec l’avenir, pour laisser le passé vivre impunément sur leurs cadavres.

Oui, les hommes du passé doivent bien s’attendre à payer les frais de la guerre qu’ils nous ont suscitée…