Page:Karr - Contes et nouvelles, 1867.djvu/22

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
16
CONTES ET NOUVELLES.

vient pas ; de quatorzième que vous étiez, et comme tel digne de tous les égards, vous êtes retombé à l’état de treizième, et, en conséquence, à l’état de mauvais présage, d’araignée rencontrée le matin, ou de corneille vue à gauche. Il a d’abord été question de vous renvoyer par un moyen adroit, mais on n’a pas trouvé de moyen adroit.

— Mademoiselle, dis-je assez bêtement, je suis prêt à me retirer.

— Votre réponse a tellement peu le sens commun, me dit-elle avec un léger mouvement d’impatience, que j’ai presque envie de vous laisser partir. On a abandonné ce projet ; mais on lui fait succéder celui de me faire dîner dans ma chambre. J’ai montré moins de résignation que vous, et j’ai demandé à ma mère la permission de faire mettre, auprès de la grande table, une petite table, où nous dînerons, vous et moi, comme les deux plus jeunes, si toutefois ce projet n’a rien qui choque votre susceptibilité ; par ce moyen, ils ne seront que onze, et éviteront, sinon le danger, du moins la peur de mourir dans l’année.

Elle me quitta sans attendre ma réponse, et