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POUR NE PAS ÊTRE TREIZE.

— Et moi, je vais retourner à Lausanne, je vais me jeter aux genoux de mon oncle.

— De votre oncle ?

— Il a promis à mon père mourant…

— Mais, insensé ! ne savez-vous donc pas que c’est votre oncle que je dois épouser ?

— Mon oncle !

— Lui-même.

— On ne m’en a rien dit ; voilà pourquoi on m’éloignait de Lausanne.

— Et voilà une des causes pour lesquelles je m’intéressais à vous, pour lesquelles je vous aimais, pauvre enfant ! Mon père avait exigé de votre oncle qu’il me reconnût, dans le contrat, des avantages qui vous déshériteraient plus d’à moitié. J’aurais été pour vous un objet de haine, vous dont je serais si heureuse de faire le bonheur, que je ne sais pas si je puis avoir d’autre bonheur que le vôtre. D’abord, je n’ai pensé qu’à obtenir votre amitié, qu’à vous faire comprendre combien c’était contre mon gré que je vous faisais du tort, qu’à ne pas vous laisser croire que j’avais un bonheur fait de votre malheur.