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jusqu’au pied du tertre. La glace causait de plus en plus haut autour d’eux, mais le tertre tenait bon ; et, comme la jeune fille levait les yeux vers son compagnon, celui-ci dressa son coude droit et le projeta en avant, faisant ainsi le geste par lequel un Inuit désigne la terre sous la forme d’une île. Et c’était la terre en effet où la Chose boiteuse à huit pattes les avait conduits — quelque îlot du large à pointe de granit et à grèves de sable, ferré, gainé et masqué de glace au point que nul homme n’aurait pu le distinguer de la banquise : mais là-dessous, c’était la terre ferme et non plus la glace mouvante. Le bris et le rebondissement des glaçons, lorsqu’ils touchaient terre et volaient en éclats, en marquaient le contour, et un banc de sable ami s’avançait vers le nord, et faisait dévier l’élan des glaces les plus lourdes, exactement comme un soc de charrue retourne la glèbe. Il y avait à craindre, sans doute, qu’un champ de glace fortement pressé remontât la grève d’un élan subit, vînt raser la racine de l’îlot, et l’emportât d’un coup, mais cela ne troublait ni Kotuko ni la jeune fille, tandis qu’ils construisaient leur maison de neige et se mettaient à manger parmi le tumulte des glaces qui dansaient le long du rivage martelé. La