Page:Kotzebue - Supplement au theatre choisi.djvu/105

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nigne influence a ranimé mes sens. Dieu tout bon, qui, jusqu’à ce moment, as garanti ma vie… reçois mes humbles actions de grâces ! (elle regarde dans le sac qui est à côté d’elle) J’ai bien faim… pas un seul morceau de pain !… et mon corps, épuisé par la maladie et la langueur, ne peut plus retrouver ses forces… Dieu ! que cet état est cruel !… Si mon fils savait !… Ah ! où est-il ? vit-il encore ?… ou bien cette terre, sur laquelle je traîne ma malheureuse existence… cette terre, couvrirait-elle ses cendres inanimées… Oh ! non ! Dieu tout bon, qui veux que je vive, tu ne fermeras point mes yeux à la lumière avant que je l’aye revu, que je l’aye embrassé encore une fois ! (un paysan traverse le théâtre : Wilhelmine lui tend la main comme pour demander la charité ; il fait un geste de refus, et passe.) Point de pitié !… voilà comme ils sont tous… Tu le sais, cependant, ciel ! qui vois mes souffrances, tu sais si, au temps de ma prospérité, j’ai refusé jamais de secourir le pauvre ou l’indigent !… mais, peut-être, cet homme, plus malheureux que moi, est-il lui-même dans le besoin… Ah ! Wilhelmine, prends-y garde. Le malheur rend injuste… Hélas ! c’est encore un des maux qu’il traîne après lui… Toi seul, auteur de toutes mes peines… cause unique de tous mes malheurs, c’est toi seul que j’ai le droit d’accuser d’inhumanité… puisses-tu cependant être heureux, s’il peut être encore pour toi de bonheur sur la terre !… Ah ! si le hasard pouvait t’amener dans ces lieux…