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nent de plus en plus nombreux. Il se comporte avec beaucoup d’afféterie et déclare qu’il ne pourrait plus vivre au milieu des hommes qui boivent et qui fument. Il pense et sent tout à fait en femme. On doit le traiter dorénavant en femme, et le mettre dans la section des femmes. Il demande des confitures, des gâteaux fins. Pris de ténesme et de spasme de la vessie, il demande à être transporté dans un hôpital d’accouchement, et à être traité comme une malade enceinte. Le magnétisme morbide des hommes qui le soignent a une action nuisible sur lui.

Passagèrement, il se sent encore, par moments, homme, mais il plaide d’une manière très significative pour son sens sexuel morbide, inverti ; il veut la satisfaction par la masturbation, le mariage sans coït. Le mariage est une institution de volupté. La fille qu’il épouserait devrait être onaniste.

À partir du mois de décembre 1872, la conscience de sa personnalité se transforme définitivement en une conscience féminine. Il a été de tout temps une femme, mais, entre un et trois ans, un empirique, un charlatan français, lui a greffé des parties génitales masculines et a empêché le développement de ses mamelles en lui frottant et en lui préparant le thorax.

Il demande énergiquement à être interné dans la section des femmes, à être protégé contre les hommes qui veulent le prostituer et à être habillé en femme. Éventuellement il serait disposé à s’occuper dans un magasin de jouets d’enfants, à faire de la couture ou du découpage, ou à travailler pour une modiste. À partir du moment de la transformatio sexus, commence pour le malade une ère nouvelle. Dans ses souvenirs, il considère son individualité d’autrefois comme celle d’un cousin à lui.

Pour le moment, il parle de lui-même à la troisième personne ; il déclare être la comtesse V…, la meilleure amie de l’impératrice Eugénie, demande des parfums, des corsets, etc. Il prend les autres hommes de l’asile pour des femmes, essaie de se tresser une natte, demande un cosmétique oriental pour l’épilation, afin qu’on ne mette plus en doute sa nature de femme. Il se plaît à faire l’apologie de l’onanisme, car « il était, dès l’âge de quinze ans, onaniste, et il n’a jamais cherché de satisfactions d’un autre genre ». Occasionnellement on observe encore chez lui des malaises neurasthéniques, des hallucinations olfactives, des idées de persécution. Tous les faits de sa vie qui se sont passés jusqu’au mois de décembre 1872, reviennent à la personnalité du cousin.

Le malade ne peut être dissuadé de son idée fixe qu’il est la