Page:Krafft-Ebing - Psychopathia Sexualis, Carré, 1895.djvu/586

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de blennorragie avec orchite et qui était couché dans l’appartement du docteur S… où on le soignait. Le docteur S… fit auprès du procureur des démarches pour obtenir la mise en liberté de G… ; il offrit même un cautionnement, ce qui fut refusé. Dans sa requête adressée au tribunal, le docteur S… prétend qu’il y a trois ans il fit dans la rue la connaissance du jeune G…, que depuis il l’avait perdu de vue, et qu’il ne l’aurait retrouvé qu’à l’automne de 1887 dans le magasin de son père. Depuis novembre 1887, c’est G… qui était chargé de fournir la viande nécessaire pour la cuisine du docteur ; il venait le soir pour prendre la commande et le matin pour livrer la marchandise. C’est ainsi que le docteur S… fit une connaissance plus étroite de G…, et peu à peu il eut des sentiments amicaux pour ce jeune homme. Le docteur S… tomba malade et resta la plupart du temps au lit jusqu’au 15 mai 1888 ; G… eut tant d’attentions pour lui que S… ainsi que sa femme le prirent en affection à cause de son attitude gaie, innocente et toute filiale. Le docteur S… lui montrait sa collection d’antiquités, et tous deux passaient souvent ensemble des soirées pendant lesquelles Mme S… leur tenait compagnie. S… prétend encore avoir fait avec G… des essais de fabrication de saucisses et de gelées, etc. Vers la fin du mois de février, G… fut atteint de blennorragie. Comme le docteur S… l’estimait comme un ami, qu’il aimait beaucoup à soigner les malades et qu’il avait étudié la médecine pendant plusieurs semestres, il s’occupa de G… et lui donna des médicaments, etc. Comme G… était encore malade au mois de mai et que, pour bien des raisons, il aurait été désirable qu’il quittât la maison paternelle, M. et Mme S… le prirent chez eux pour le soigner.

S… repousse avec indignation toutes les suspicions auxquelles ces faits ont donné lieu ; il invoque son passé honorable, sa bonne éducation, la circonstance qu’à cette époque G… était atteint d’une maladie dégoûtante et contagieuse et que lui-même S… souffre d’une maladie douloureuse (calculs néphrétiques avec coliques temporaires).

En face de cette version bien inoffensive du docteur S…, il faut cependant tenir compte des faits suivants qui ont été établis par l’enquête judiciaire et sur lesquels s’est appuyée la sentence du tribunal de première instance.

La liaison de S… et G… a provoqué, par son caractère choquant, bien des commentaires chez les particuliers et dans les cabarets. G… passait la plupart de ses soirées dans le cercle de la famille de