Page:Kropotkine - L’Anarchie, sa philosophie, son idéal.djvu/44

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travaille, en même temps, à maintenir et à élargir le noyau précieux de coutumes de sociabilité sans lesquelles aucune société humaine ou animale ne saurait exister. Seulement, au lieu de demander le maintien de ces coutumes sociables à l’autorité de quelques-uns, elle le demande à l’action continue de tous.

Les institutions et les coutumes communistes s’imposent à la société, non seulement comme une solution des difficultés économiques, mais aussi pour maintenir et développer les coutumes sociables, qui mettent les hommes en contact les uns avec les autres, établissant entre eux des rapports qui fassent de l’intérêt de chacun l’intérêt de tous, et les unissant, au lieu de les diviser.




Quand nous nous demandons, en effet, par quels moyens un certain niveau moral peut être maintenu dans une société humaine ou animale, nous n’en découvrons que trois : la répression des actes anti-sociaux, l’enseignement moral, et la pratique même de l’appui mutuel. Et puisque tous les trois ont été pratiqués, nous pouvons les juger à leurs œuvres.

Quant à l’impuissance de la répression, elle est suffisamment démontrée par le désarroi de la société actuelle et par la nécessité même de la révolution que nous désirons ou que nous sentons tous inévitable. Dans le domaine économique, la coercition nous a conduits au bagne industriel ; dans le domaine politique — à l’État, c’est-à-dire à la destruction de tous les liens qui existaient jadis entre citoyens (les jacobins de 1793 brisèrent ceux mêmes qui avaient résisté à l’État monarchique), afin que la nation devienne une masse in-