Page:Kropotkine - L Entraide un facteur de l evolution, traduction Breal, Hachette 1906.djvu/106

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la trace dans le pliocène, ou même dans le miocène, qui sont des dépôts de la période tertiaire. Mais nous avons la méthode indirecte qui nous permet de jeter quelque lumière jusqu’à cette lointaine antiquité. Une investigation minutieuse des institutions sociales des peuples primitifs a été faite pendant les quarante dernières années, et elle a révélé parmi leurs institutions actuelles des traces d’institutions beaucoup plus anciennes, qui ont disparu depuis longtemps, mais cependant ont laissé des vestiges indubitables de leur existence antérieure. Toute une science consacrée à l’embryologie des institutions humaines s’est ainsi développée par les travaux de Bachofen, Mac Lennan, Morgan, Edward Tylor, Maine, Post, Kovalesvsky, Lubbock et plusieurs autres. Et cette science a établi avec certitude que l’humanité n’a pas commencé sous la forme de petites familles isolées.

Loin d’être une forme primitive d’organisation, la famille est un produit très tardif de l’évolution humaine. Aussi loin que nous pouvons remonter dans la paléo-ethnologie de l’humanité, nous trouvons les hommes vivant en sociétés, en tribus semblables à celles des mammifères les plus élevés ; et il a fallu une évolution extrêmement lente et longue pour amener ces sociétés à l’organisation par gens ou par clan, laquelle, à son tour, eut à subir aussi une très longue évolution avant que les premiers germes de la famille, polygame ou monogame, pussent apparaître. Ainsi des sociétés, des bandes, des tribus — et non des familles — furent la forme primitive de l’organisation de l’humanité chez ses ancêtres les plus reculés. C’est là qu’en est arrivé l’ethnologie après des recherches laborieuses. Et en cela elle a simplement abouti à ce qu’aurait pu prévoir un zoologue. Aucun des mammifères supérieurs, sauf quelques carnivores