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propres rivalités et de leurs luttes réciproques. Les historiens impérialistes ont particulièrement soutenu cette théorie qui cependant ne se trouve pas confirmée par les recherches modernes. Il est vrai qu’en Italie les cités se combattirent l’une l’autre avec une animosité opiniâtre, mais nulle part ailleurs ces luttes n’atteignirent les mêmes proportions ; et même en Italie, les guerres des cités, particulièrement celles de la première période, eurent leurs causes spéciales. Ce n’était (comme l’ont déjà montré Sismondi et Ferrari) qu’une simple continuation de la guerre contre les châteaux — le principe de la libre municipalité et de la libre fédération entrant inévitablement en lutte violente contre la féodalité, l’impérialisme et la papauté. Beaucoup de villes qui n’avaient pu secouer que partiellement le joug de l’évêque, du seigneur ou de l’empereur, furent littéralement poussées contre les cités libres par les nobles, l’empereur et l’Église, dont la politique était de diviser les cités et de les armer l’une contre l’autre. Ces circonstances spéciales (qui eurent un contre-coup partiel aussi en Allemagne) expliquent pourquoi les villes italiennes, dont quelques-unes cherchaient à avoir l’appui de l’empereur pour combattre le pape, tandis que d’autres recherchaient l’appui de l’Église pour résister à l’empereur, furent bientôt divisées en deux camps, Gibelins et Guelfes, et pourquoi la même division se reproduisit dans chaque cité[1].

L’immense progrès économique réalisé par la plupart des cités italiennes à l’époque même où ces guerres étaient le plus acharnées[2], et les alliances si

  1. Les généralisations de Ferrari sont souvent trop théoriques pour être toujours correctes ; mais ses opinions sur le rôle joué par les nobles dans les guerres des cités sont basées sur un grand nombre de faits authentiques.
  2. Seules les cités qui soutinrent obstinément la cause des barons,