Page:Kropotkine - L Entraide un facteur de l evolution, traduction Breal, Hachette 1906.djvu/313

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qui est toujours partagée avec les voisins ; des mineurs de Radstock qui, ayant l’avantage de posséder de grands jardins potagers, invitèrent quatre cents mineurs de Bristol à venir prendre leur part de choux et de pommes de terre, et ainsi de suite... Tous les correspondants des journaux, durant la grande grève des mineurs du Yorkshire, en 1894, savaient quantité de faits semblables, mais tous ne voulaient pas donner des détails aussi « déplacés » à leurs journaux respectifs[1].

Le syndicat n’est pas cependant la seule forme par laquelle se manifeste le besoin d’entr’aide de l’ouvrier. Il y a encore les associations politiques, considérées par bien des ouvriers comme plus capables de conduire au bien-être général que les unions de métier, qui n’ont jusqu’à présent que des desseins limités. Bien entendu, le simple fait d’appartenir à un corps politique ne peut pas être regardé comme une manifestation de la tendance à l’entr’aide. Nous savons tous que la politique est le champ dans lequel les éléments purement égoïstes de la société forment les combinaisons les plus complexes avec les aspirations altruistes. Mais tout politicien expérimenté sait que les grands mouvements politiques ont été ceux qui avaient de grands buts, souvent très lointains, et que les plus puissants ont été ceux qui ont provoqué l’enthousiasme le plus désintéressé. Tous les grands mouvements historiques ont eu ce trait distinctif, et pour notre génération, le socialisme est dans ce cas. « Ce sont des agitateurs payés », disent ceux qui ne connaissent rien à la question. Mais la vérité est que pour parler seulement de ce que je sais personnellement — si j’avais tenu un journal pendant ces derniers

  1. On trouvera beaucoup de faits semblables dans le Daily Chronicle et quelques-uns dans le Daily News d’octobre et novembre 1904.