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en entier et résolue dans le sens de l’article 1er de l’arrêté du 4 août[1].

Il ne s’agit pas de faire aujourd’hui, à cent ans de distance, des réclamations contre l’Assemblée Nationale. Au fait, l’Assemblée a fait tout ce que l’on pouvait espérer d’une assemblée de propriétaires et de bourgeois aisés ; peut-être a-t-elle fait même plus. Elle lança un principe, et par là elle invita, pour ainsi dire, à aller plus loin. Mais il importe de bien se rendre compte de ces restrictions, car si l’on prend à la lettre l’article qui annonçait la destruction entière du régime féodal, on risque de ne rien comprendre à toutes les quatre années de la Révolution qui suivent, et encore moins aux luttes qui éclatèrent au sein de la Convention en 1793.


Les résistances, auxquelles ces arrêtés vinrent se heurter, furent immenses. S’ils ne pouvaient nullement satisfaire les paysans, et s’ils devinrent le signal d’une forte recrudescence de la jacquerie, — les nobles, le haut clergé et le roi virent dans ces arrêtés le dépouil-

  1. Buchez et Roux (Histoire parlementaire de la Révolution française, t. II, p. 243), ne voyaient dans les abdications du 4 août que des concessions rendues nécessaires par les débats sur la Déclaration des Droits de l’Homme. La majorité étant acquise à cette déclaration, le vote de celle-ci aurait emporté nécessairement l’abolition des privilèges. — Il est aussi intéressant de voir comment Madame Élisabeth annonçait la nuit du 4 août à son amie, madame de Mombelles : — « La noblesse, écrit-elle, avec un enthousiasme digne du cœur françois, a renoncé à tous ses droits féodaux et au droit de chasse. La pêche y sera, je crois, comprise. Le clergé a de même renoncé aux dîmes, casuels et à la possibilité d’avoir plusieurs bénéfices. Cet arrêté a été ensuite envoyé dans toutes les provinces. J’espère que cela fera finir la brûlure des châteaux. Ils se montent à soixante-dix. » (Conches, ouvrage cité, p. 238.)