Page:Kropotkine - La Grande Révolution.djvu/232

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on arriva à l’idée des assignats à cours forcé, dont la valeur serait garantie par les biens nationaux confisqués au clergé, et qui seraient remboursés à mesure que la vente de ces biens ferait rentrer de l’argent.

On peut imaginer les spéculations colossales auxquelles donnèrent lieu cette vente de biens nationaux sur une grande échelle et l’émission des assignats. On devine facilement l’élément que ces deux mesures introduisirent dans la Révolution. Et cependant, jusqu’à présent économistes et historiens sont à se demander s’il y avait un autre moyen pour parer aux besoins pressants de l’État. Les crimes, l’extravagance, les vols, les guerres de l’ancien régime pesaient sur la Révolution. Commencée avec cet immense fardeau de dettes que l’ancien régime lui avait léguées, la Révolution dut en supporter les conséquences. Sous peine d’une guerre civile, encore plus terrible que celle qui se déchaînait déjà – sous la menace de se mettre à dos la bourgeoisie qui, tout en poursuivant ses buts, laissait cependant le peuple s’affranchir de ses seigneurs, mais aurait tourné contre toute tentative d’affranchissement, si les capitaux qu’elle avait engagés dans les emprunts étaient menacés, – placée entre ces deux dangers, la Révolution adopta le plan des assignats, garantis par les biens nationaux.

Le 29 décembre 1789, sur la proposition des districts de Paris (voy. plus loin, ch. xxiv), l’administration des biens du clergé était transférée aux municipalités, qui devaient mettre en vente pour 400 millions de ces biens. Le grand coup était frappé. Et, dès lors, le clergé, sauf quelques curés de village, amis du peuple, voua une haine à mort à la Révolution, – une haine cléricale,