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profiter de la première révolte des soldats, pour la noyer dans le sang, en s’aidant des régiments royalistes restés fidèles à leurs chefs.

L’occasion se présenta bientôt à Nancy.

L’Assemblée nationale, en apprenant cette agitation parmi les militaires, vota, le 6 août 1790, une loi qui diminuait les effectifs de l’armée, défendait les « associations délibérantes » des soldats dans les régiments, mais en même temps ordonnait aussi que les comptes d’argent fussent rendus sans retard par les officiers à leurs régiments.

Dès que ce décret fut connu à Nancy, le 9, les soldats — surtout les suisses du régiment de Châteauvieux (pour la plupart, Vaudois et Genevois) — demandèrent des comptes à leurs officiers. Ils enlevèrent la caisse de leur régiment pour la placer sous la sauvegarde de leurs sentinelles, menacèrent leurs chefs et envoyèrent huit délégués à Paris pour plaider leur cause devant l’Assemblée nationale. Les mouvements des troupes autrichiennes à la frontière vinrent accroître la fermentation.

L’Assemblée, entre temps, sur de faux rapports, parvenus de Nancy, et poussée par le commandant des gardes nationaux, Lafayette, auquel la bourgeoisie avait pleine confiance, vota le 16 un décret condamnant les soldats pour leur indiscipline, et ordonnant aux garnisons et aux gardes nationales de la Meurthe de « réprimer les auteurs de la rébellion ». Leurs délégués furent arrêtés, et Lafayette lança de son côté une circulaire, convoquant les gardes nationales des bourgs voisins de Nancy pour combattre la garnison révoltée de cette ville.

Cependant à Nancy même tout semblait s’arranger