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sentation du rapport du Comité des subsistances, l’Assemblée discuta les mesures à prendre pour garantir le pain et le travail au peuple. On parla des heures entières, on fit proposition sur proposition. Pétion proposa un emprunt, d’autres proposèrent d’autoriser les assemblées provinciales à prendre les mesures nécessaires – mais on ne décida rien, on n’entreprit rien : on se borna à plaindre le peuple. Et lorsqu’un des membres souleva la question des accapareurs et en dénonça quelques-uns, il eut toute l’Assemblée contre lui. Deux jours plus tard, le 6 juillet, Bouche annonça que l’on en connaissait les coupables et qu’une dénonciation formelle serait faite le lendemain. « Un effroi général s’empara de l’Assemblée, » dit Gorsas, dans le Courrier de Versailles et de Paris, qu’il venait de fonder. Mais vint le lendemain, et pas un mot de plus ne fut prononcé sur le sujet. On étouffa l’affaire entre deux séances. — Pourquoi ? De peur — les événements vont le prouver — de révélations compromettantes.

En tout cas l’Assemblée craignait tellement la révolte populaire que lorsqu’il y eut émeute à Paris le 30 juin, à la suite de l’arrestation de onze gardes-françaises qui avaient refusé de charger leurs fusils à cartouches, l’Assemblée vota une adresse au roi, conçue en termes aussi serviles que possible, et protesta de son « profond attachement à l’autorité royale »[1].

  1. « L’Assemblée nationale gémit des troubles qui en ce moment agitent Paris… Il sera fait au roi une députation pour le supplier de vouloir bien employer, pour le rétablissement de l’ordre, les moyens infaillibles de la clémence et de la bonté qui sont si naturelles à son cœur, et de la confiance que son bon peuple méritera toujours. »