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Page:Krudener - Valerie.djvu/151

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cette place ; il avoit aussi des lilas noués dans un mouchoir : il savait combien j’aimois cette fleur hâtive et douce, et ses soins en avoient obtenu quelques-unes de la saison même qui les refuse presque toujours. Leur parfum me réveilla de ma sombre rêverie ! je vis Gustave si heureux de m’en apporter que je ne pus m’empêcher de lui sourire pour l’en remercier ; et Gustave retrouvera dans le tableau, près de la place où je suis assise, un mouchoir noué d’où s’échappent des lilas, et son nom tracé sur le mouchoir.

Je vous envoie aussi une très belle table de marbre de Carrare, rose comme la jeunesse, et veinée de noir comme la vie ; faites-la placer sur le tombeau de mon fils. Elle n’a que cette simple inscription : Ici dort Adolphe de M…, du double sommeil de l’innocence et de la mort.

Je vous envoie aussi de jeunes arbustes que j’ai trouvés dans la Villa-Médicis, qui viennent des îles du sud et fleurissent plus tard que ceux que nous avons déjà : en les couvrant avec précaution l’hiver, ils ne périront pas, et nous aurons encore des fleurs quand les autres seront tombées.

Mon mari vous écrira de Rome ; il vous envoie deux vues de Volpato. Faites placer mon portrait dans le petit salon jaune où nous prenons le thé ordinairement.


Eh bien ! Ernest, que dis-tu de cette charmante lettre, si enivrante pour moi, et pourtant si pure ? Que je serois le plus abject des hommes, si je