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Page:Krudener - Valerie.djvu/74

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vage liberté, et, charmés de silence et de solitude, nous nous reposerions, comme nous le fîmes si souvent, de nos courses vagabondes. Ce besoin d’errer sans projet, sans dessein, t’ôtoit quelque chose de ces forces trop actives, trop dévorantes. Oh ! que n’es-tu encore ici, que ne calmes-tu ainsi cette agitation de ton âme, qui te jette maintenant dans des dangers que je crains tant pour toi ! Tu le sais, Gustave, je n’ai jamais redouté l’amour, il est désarmé, pour moi, par la tranquillité de mon imagination, par une foule d’habitudes douces, de sensations peut-être monotones, mais qui par là même ont un empire continuel. Ma vie se compose d’un doux bien-être, et je ressemble à ces végétaux de l’Inde que la nature destina à garantir de l’orage, puisque l’orage ne les frappe jamais. C’est ainsi que je me crois plus fait que bien d’autres pour calmer, pour diriger un peu les mouvemens trop exaltés de ton âme. Ce n’est pas ton absence seule qui me chagrine, c’est cette passion que chaque jour verra augmenter avec les charmes, et surtout avec les vertus de Valérie. Oui, Gustave, elle croîtra avec ces dangereuses compagnes, elle consumera ces forces avec lesquelles tu luttes encore. Oh ! crois-moi, reviens, arrache-toi à ces funestes habitudes ! Ouvre ton âme à cet ami que tu m’as appris à respecter, reviens ; n’a-t-il pas pour but ton bonheur, et pour règle ses devoirs ? Ton âme vaste et grande le frappa, il te crut propre aux plus brillans développemens ; et, mûri