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Page:Krudener - Valerie.djvu/81

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de fleurs des pruniers voisins, qui, de leur duvet et de leurs douces couleurs, sembloient la caresser. Elle sourioit en les assemblant autour d’elle ; et moi, la voyant si belle, si pure, je sentis que j’eusse voulu mourir comme ces fleurs, pourvu qu’un instant son souffle me touchât. Mais, au milieu du trouble délicieux d’un premier amour, au milieu de cette volupté d’un matin et d’un printemps d’Italie, un pressentiment funeste vint me saisir ; Valérie s’en aperçut, et me dit que j’avois l’air préoccupé. « Je pense aux feuilles de l’automne qui, flétries et desséchées, tomberont et couvriront ces fleurs. — Et nous aussi », dit-elle. Le comte nous appela alors pour nous montrer une inscription ; mais Valérie vint bientôt reprendre sa place. Un grand et beau papillon, qu’on nomme, je crois, le sphinx, enchanta Valérie par ses couleurs : il étoit sur un des figuiers, le comte voulut le prendre pour l’apporter à sa femme ; mais, comme le Sphinx de la Fable, il alla s’asseoir sur le seuil du temple ; je courus pour m’en saisir, mon pied glissa, et je tombai ; bientôt relevé, j’eus le temps de saisir encore le papillon, que j’apportai à la comtesse. Tout effrayée de ma chute, elle étoit pâle, et le comte s’en aperçut. « Je parie, dit-il, que Valérie a la superstition de sa mère et de beaucoup de personnes de sa patrie. — Oui, dit-elle, je suis honteuse de l’avouer. — Et quelle est cette superstition ? » demandai-je d’une voix émue. Le comte me répondit en riant : « C’est