Page:Kufferath - L’Art de diriger l’orchestre, 1890.djvu/21

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
17
l’orchestre

des allegros de Mozart. » De la sorte, la symphonie devait être, en effet, une chose dénuée de sens. C’est que Dionys Weber, comme la plupart des maîtres de chapelle de son époque, – et Beethoven s’en plaignit maintes fois avec amertume, – était absolument incapable d’embrasser complètement la pensée du maître, de comprendre tout ce qu’il avait entendu exprimer dans ses œuvres, lui, dont le profond génie reflétait et synthétisait en quelque sorte tout le mouvement intellectuel politique et social de son temps. Les grands poèmes symphoniques de Beethoven étaient incontestablement en avance, et de beaucoup, non seulement au point de vue de la forme musicale, mais aussi au regard de leur contenu poétique et philosophique, sur l’idée que les contemporains pouvaient avoir d’une composition musicale. Mieux au fait de ses intentions et de ses rêves, le chf d’orchestre moderne a pu ainsi apporter à l’interprétation de ses œuvres plus de profondeur, de relief, de couleur qu’on n’y mettait du vivant même de Beethoven, alors que les esprits n’étaient pas suffisamment préparés à cet art élevé. La postérité apprécie souvent le génie mieux que les contemporains. Cela est vrai surtout pour les génies véritablement novateurs ; ils ne sont généralement compris que très imparfaitement de leur vivant. Wagner en est le dernier exemple.

Tout cela, en somme, aboutit à la condamnation en ce qui concerne l’exécution orchestrale des prétendues traditions classiques. Elles sont rarement intelligentes. Sur ce point, M. P. Benoit est absolument d’accord avec Wagner. Pour Beethoven, par exemple, il y a une trentaine d’années, les traditions se composaient encore