eut l’intuition de l’interprétation à donner aux œuvres de Beethoven. Il signale à ce propos la cadence si émouvante du hautbois dans la deuxième partie de l’allegro de la symphonie en ut mineur que toujours il avait entendue exécuter
sans aucune expression. Essayez de la chanter, en tenant
longuement le sol aigu surmonté du point d’orgue,
en ayant bien soin d’observer la liaison sur toute la phrase,
le decrescendo indiqué et le point d’orgue final ; elle
acquiert aussitôt une tristesse émouvante que l’exécution
instrumentale arrive bien rarement à réaliser.
Il est clair, cependant, que c’est bien ainsi que Beethoven
a dû la chanter en lui-même et que cette cadence
entre deux points d’orgue est destinée à marquer
une suspension, un arrêt dans le développement de
son allegro, quelque chose comme un soupir, un regret,
une aspiration douloureuse venant interrompre le flot tu-
un jour à un hautboïste auquel il lui fut impossible de faire comprendre
l’accent particulier qu’il désirait donner à une phrase d’une de ses
œuvres. En désespoir de cause il se rendit chez une cantatrice du
théâtre et la pria de chanter cette phrase devant l’instrumentiste,
auquel il la fit répéter ensuite jusqu’à ce qu’il eût obtenu l’accentuation
voulue.
Il y aurait utilité quelquefois pour nos chefs d’orchestre d’user
de ce moyen pratique. Il faut dire, cependant, que dans nos grandes
villes les artistes d’orchestre sont généralement aujourd’hui, et grâce
à l’enseignement des Conservatoires, des musiciens expérimentés et
assez instruits pour comprendre sans qu’il soit besoin de les seriner
comme ce hautboïste zurichois. Les rapports se sont plutôt renversés.
Ce sont les chanteurs, maintenant, qui pourraient recevoir d’utiles
indications des instrumentistes.