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Page:L'Écuyer - La fille du brigand, 1914.djvu/26

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LA FILLE

n’allez pas croire, Stéphane, que cette femme a toujours été ce qu’elle est aujourd’hui.

— Comment savez-vous cela ? dit Henri.

— C’est une simple supposition que je fais, Henri, et je la crois assez fondée ; il n’est pas possible qu’une femme puisse apprendre la politesse avec des gens qui l’ignorent absolument ; la politesse ne s’acquiert qu’avec une bonne éducation.

— Vous avez raison, Émile, dit Stéphane : cette femme peut avoir et doit nécessairement avoir été bien élevée. Qui sait ? elle appartient peut-être à une famille respectable ; il y a tant d’exemples à présent qui nous prouvent qu’une pareille dégradation est possible et même facile.

L’hôtesse entra en ce moment avec une bouteille de vin cachetée et demanda à Stéphane la permission d’introduire avec eux un homme et une jeune fille qui venaient d’arriver.

— Une jeune fille dehors dans un pareil temps ! voilà du mystérieux. Et d’où viennent-ils, s’il vous plaît ? dit Stéphane en débouchant la bouteille et en faisant une grimace dédaigneuse, à l’odeur et au goût aigre et amer du vin falsifié qu’elle contenait.

— Je l’ignore, monsieur, seulement ils paraissent venir de loin, ils sont en voiture et tout couverts de boue et d’eau.

— Faites-les entrer, madame, quels qu’ils soient.

L’orage était alors à sa plus grande fureur ; le tonnerre venait de tomber à quelques pieds de l’auberge ; l’éclair sillonnait en tous sens l’atmosphère qui paraissait comme un océan de feu ; la pluie tombait par torrents ; le vent faisait craquer horriblement le toit et les pans de la maison.

— Ciel ! quel orage, dit Henri, en allant fermer une fenêtre qui venait de s’ouvrir avec violence, je n’ai jamais rien vu de si effrayant.

Mme La Troupe venait d’entrer avec les nouveaux personnages qu’elle venait d’annoncer et avec qui elle paraissait être en parfaite connaissance ;