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DU BRIGAND
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charnées et toujours fermées indiquaient des muscles et des nerfs d’acier toujours tendus avec violence.

Après maître Jacques, qui s’occupait et dont la seule charge était de conduire la troupe et de régler les comptes, si nous pouvons nous servir de cette expression, le père Munro était le premier, l’âme de cette société infernale. Rien ne se faisait sans lui. Se présentait-il un coup de maître à faire, une entreprise épineuse et pleine de dangers à mettre à exécution, un meurtre horrible à commettre, un vol combiné à exécuter, le père Munro était toujours le premier à l’œuvre. Il avait vieilli dans le crime ; personne plus que lui n’en connaissait les dangers, les hasards, les différentes phases.

Le père Munro avait tout éprouvé : la prison, la marque, le pilori, le fouet étaient pour lui des punitions familières ; enfin il avait évité trois fois le gibet en se sauvant de son cachot.

D’après ce qui précède, on doit penser que le père Munro jouissait auprès de ses semblables d’une réputation à toute épreuve. On sait que, dans une armée, un général qui est couvert de blessures, qui a affronté tous les hasards et les dangers, qui a bravé la mort et lui a échappé souvent, est élevé jusqu’aux nues par tous ses inférieurs ; que plus il est brave, plus sa réputation est brillante : il en est de même avec les brigands ; avec eux aussi, plus on est scélérat, plus on est estimé.

Passons à Lampsac.

Lampsac est le bras droit du père Munro. Il est comme lui, hardi, féroce, entreprenant, actif, et lorsqu’il sera à son âge, il aura acquis la même renommée. Lampsac n’a que trente ans.

Il est d’une grandeur athlétique, d’une force démesurée, d’une agilité peu commune. Il n’a pas une figure tout à fait désagréable ; différent du père Munro, il ne porte pas sa férocité sur sa figure ; au contraire ses yeux bleus expriment un air de mélancolie et de bonté ; il sourit avec assez de grâce, mais il s’exprime avec rudesse, le son de sa voix est