Page:L'Écuyer - La fille du brigand, 1914.djvu/96

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— Que trop peut-être, dit le malheureux en soupirant.

— Comment que trop ? ça n’peut jamais aller trop ben.

— Où demeure cet homme ?

— Justement dans une des premières maisons de Sainte-Foye, une jolie p’tite maison, sur mon âme, propre comme un sou ben frotté.

— Tu y es entré ?

— Comment donc ? vous savez ben que je manque jamais mon coup, dit Magloire avec importance. J’ai suivi mon « gars », avec beaucoup de peine par exemple ; il allait d’un pas de cheval. Je n’me suis arrêté qu’à quelques arpents de la maison, et j’me suis enfourné dans un tas de branches ; il n’a pas été dix minutes dedans, et il a gagné le bois du Cap-Rouge.

— C’est bien cela, dit Stéphane à demi-voix, les misérables !

— Quoi ?

— Rien, Magloire, rien.

— Aussitôt que je l’ai vu dans le bois, j’suis sorti d’mon trou, et, en faisant semblant d’être ben fatigué, j’suis entré pour me r’poser. Et puis, une chance du bon Dieu, il n’y avait que deux p’tites filles, propres comme deux petites chattes, et puis jolies ! oh, dame, t’nez, j’commence à être sur l’âge pourtant, et ben j’nai pu m’empêcher de leur faire les yeux doux, ma parole d’honneur. Il y en avait une surtout, justement celle à qui j’ai donné vot’ lettre, t’nez, vrai comme j’m’appelle Magloire, c’est comme le petit enfant Jésus de la messe de minuit.

Stéphane sourit malgré lui.

— Tu lui as donné la lettre ?

— Eh oui, vous me l’aviez dit, pas vrai ?

— Oui ! je te remercie, Magloire…

Elle sait tout à présent, murmura Stéphane…

— Et qu’a-t-elle fait ?

— D’abord elle m’a remercié, car c’est poli, n’faut pas en parler ; ensuite elle a rougi, puis elle