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LE TEMPS INTÉRIEUR

tance de sa valeur. Les minutes, les heures et les années deviennent, en réalité, différentes pour chaque individu et pour chaque période de la vie d’un individu. Une année est, plus longue pendant l'enfance, beaucoup plus courte pendant la vieillesse. Elle à une autre valeur pour un enfant que pour ses parents. Elle est beaucoup plus précieuse pour lui que pour eux, parce qu’elle contient davantage d'unités de son temps propre.

Nous sentons plus ou moins clairement ces changements dans la valeur du temps physique qui se produisent au cours de notre vie. Les jours de notre enfance nous paraissaient très lents. Ceux de notre maturité sont d’une rapidité déconcertante. Ce sentiment vient peut-être de ce que, inconsciemment, nous plaçons le temps physique dans le cadre de notre durée. Et naturellement, le temps physique nous semble varier en raison inverse de cette durée. Le temps physique glisse à une vitesse uniforme, tandis que notre vitesse propre diminue sans cesse. Il est comme un grand fleuve qui coule dans la plaine. À l'aube de sa journée, l’homme marche allégrement le long de la rive. Et les eaux lui semblent paresseuses. Mais elles accélèrent peu à peu leur cours. Vers midi, elles ne se laissent plus dépasser par l’homme. Quand la nuit approche, elles augmentent encore leur vitesse. Et l'homme s'arrête pour toujours, tandis que le fleuve continue inexorablement sa route. En réalité, le fleuve n’a jamais changé sa vitesse. Mais la rapidité de notre marche diminue. Peut-être la lenteur apparente du début de la vie et la brièveté de la fin, sont-elles dues à ce qu’une année représente, comme on le sait, pour l'enfant et pour le vieillard des proportions différentes de leur vie passée. Il est plus probable, cependant, que nous percevons obscurément