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sous l’œil même de la police, en plein dix-neuvième siècle, dans la capitale du progrès et de la civilisation.

Et les journaux enregistrent tout simplement ces crimes en disant : « Les obsèques d’Hippolyte Babou ont été religieuses. Le corps de Garnier-Pagès a reçu l’absoute à l’église Saint-Roch. »

Et c’est à peine si quelques voix s’élèvent pour protester contre ces détournements de cadavres, et les protestations, toutes timides, sont bientôt rentrées dans le silence.

Eh bien ! non, il ne sera pas dit que nous aurons laissé s’accomplir de pareils scandales sans pousser, du plus profond de notre poitrine, notre cri d’indignation.

Il faut que l’on nous entende. Il faut que la volonté de nos morts soit respectée. Il faut que les soi-disant défenseurs de la propriété soient mis désormais dans l’impuissance de voler les corps.

Eh quoi ! l’on condamne à des mois de prison le filou qui s’empare, dans une foule, du mouchoir ou de la montre d’un badaud, et l’on supporterait que des scélérats vinssent impunément voler les hommes eux-mêmes lorsque la mort les a fauchés ?

Est-ce que le citoyen n’a pas la propriété de son corps ? est-ce que le droit d’en disposer peut, à un moment quelconque, appartenir à un autre ? est-ce que l’homme, l’homme honnête, doit être exposé à devenir, après son trépas, la proie du premier coquin venu ?

Mais, s’il en était ainsi, si la loi qui protège les vivants se refusait à protéger les morts, qui me répond que moi, moi qui écris ces lignes, moi qui repousse de toute ma haine et de tout mon mépris les exploiteurs de la conscience et les charlatans spéculant sur la crédulité, moi qui, si un parent contraire à mes idées amenait à mon chevet un ministre de n’importe quelle religion, cracherais