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mon dernier soupir à la face du misérable, qui me répond, dis-je, qu’une fois devenu froid et inerte, je ne serai pas livré à ces gens que je déteste, sali par leurs attouchements ignobles, et arrosé de leurs liquides répugnants ? qui me répond que ma réputation de libre-penseur ne sera pas flétrie par les voleurs de mon cadavre ? qui me répond que l’on ne racontera pas que, ma dernière heure venue, j’ai renié les croyances de toute ma vie, et que, accumulant mensonges sur mensonges, infamies sur infamies, on ne fera pas de moi, physiquement et moralement, un butin que se partageront sans pudeur les brigands que j’exècre le plus !

Allons, c’en est assez ! c’en est trop ! Pour deux vols de cadavres qui ont fait quelque bruit, combien sont ignorés !…

Il est temps de mettre un terme à ces rapines aussi odieuses qu’inconvenantes. Il est temps que nos représentants aux Assemblées nationales, prenant en main les intérêts des honnêtes gens abandonnés aux rats d’église, déclarent que les volontés suprêmes des défunts doivent être respectées, même contre le gré de leurs parents, — car, dès l’âge de vingt et un ans, l’homme n’appartient plus qu’à lui seul ; — il est indispensable qu’une loi soit promulguée, loi condamnant aux peines les plus sévères tous ceux qui, détournant un cadavre soit par violence, soit à l’aide de ruse, auront fait ou essayé de faire démentir la vie d’un citoyen par son trépas.

Alors, nous aurons le droit de mourir en paix ; nous saurons que rien de nous, après notre décès, ne sera déchiqueté, et nous nous endormirons avec la consolante certitude que notre cadavre ne sera pas jeté en pâture aux corbeaux.