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desquels les voleurs sont des chérubins, il me prend un délire d’humanité, et je m’écrie avec la plus ardente conviction : Mieux vaut cent de ces prêtres-là exterminés qu’un seul petit enfant déshonoré et pourri !

Et maintenant, Monsieur, qui êtes-vous ? et de quel droit venez-vous me faire la leçon ?

Vous vous appelez Louis Veuillot, et moi, je porte un nom complètement inconnu. Vous avez près de soixante-six ans et j’en ai à peine vingt-cinq.

Très-bien. Et après ?

Que m’importent, à moi, votre renommée et votre âge ?

Votre renommée est passagère. Votre âge me donne le droit d’exiger de vous un peu plus de dignité que vous n’en montrez.

Êtes-vous donc si respectable qu’il faille vous respecter, vous qui avez passé votre jeunesse sans avoir aucune foi politique ni aucune foi religieuse, et qui tout d’un coup, à la suite d’une visite au pape, vous êtes transformé en le Veuillot que l’on sait ! vous qui prétendez nous faire accroire aux routes de Damas purement illuminées de clartés divines ! vous qui avez été — c’est un de vos propres aveux — un condottiere de la presse ! vous qui, d’après vos biographes les plus indulgents, avez remporté vos premiers succès dans une littérature plus que légère et qui ne reculiez pas devant les hardiesses de la chanson érotique ! vous qui, même devenu un champion de l’ultramontanisme, avez écrit d’une façon telle que les évêques, vos chers évêques, ont été obligés d’interdire dans leurs diocèses la lecture de votre journal ! vous qui, dominé malgré tout par vos sentiments orduriers, mêlant quand même le profane au sacré, avez célébré, à cinquante-trois ans, les mérites de l’ignoble Thérésa !