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LES TROIS COCUS

— C’est une franc-maçonnerie d’un genre spécial, une franc-maçonnerie féminine, créée exclusivement à l’usage du clergé…

Les yeux de Chaducul brillaient comme des escarboucles.

La bonne servit le café : six tasses dans un grand plateau.

— Pourquoi six tasses ? demanda Romuald.

— Eh bien ! ne faut-il pas que vous trinquiez d’abord avec vos quatre marraines ?

— Mes quatre marraines ?

— Vous n’êtes pas au bout de vos étonnements.

Le vicaire se leva et arpenta le petit salon bleu…

— Huluberlu, mon cher, vous êtes admirable… Je vous reconnais mon maître, disait-il avec enthousiasme.

Et il allait et il venait, heureux au possible.

Tout à coup on entendit dans le lointain une voix, celle de la marquise, qui criait :

— Ohé ! ohé !… Gargoulette !… Moustache !… Sainte-Chipie !… Papillon !… ohé ! ohé !…

Romuald interrogea du regard son supérieur.

— Ce sont, dit celui-ci, vos marraines qu’on vous annonce.

Quatre jeunes filles, élégamment vêtues d’un négligé aux couleurs brillantes, faisaient leur entrée en gambadant.

— Où est le profane ? demandèrent-elles.

Huluberlu leva la jambe à une bonne hauteur, et sauta un instant sur un pied ; après quoi, il montra son vicaire qui n’en revenait pas.

Ecce homo ! dit-il gravement.

Et les quatre filles de chanter en sautillant :

Eccè, eccè homo,
Eccè homo qu’il nous faut !

Le curé de Saint-Germain-l’Empalé arrêta ces sauteries d’un geste solennel :

— Chevalières de la Croix-Rose, buvons à la santé du néophyte.

Elles prirent, toutes quatre, leurs demi-tasses et les choquèrent contre celle de Romuald, de plus en plus émerveillé.

Puis, l’une des chevalières vint s’asseoir familièrement sur les genoux du vicaire, lui donna un baiser sur chaque joue, et lui dit :

— Romuald, mon petit chien, de ce jour, moi, Gargoulette, chevalière de la Croix-Rose, je le baptise mon filleul !