Page:Léon Daudet – Alphonse Daudet.pdf/140

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
126
ALPHONSE DAUDET

celle qui réunit dans de mêmes enthousiasmes Gustave Flaubert, Ivan Tourguenev, Émile Zola, Edmond de Goncourt, Alphonse Daudet, Guy de Maupassant, Céard, Gustave Toudouze, et quelques autres. Ce n’était point là le cénacle, le groupement d’ambitions déçues, la potinière où l’on démolit les absents. Et, quand Flaubert mourut, je revois leur douleur à tous ; quelques jours auparavant, il y avait à Croisset une réunion de fidèles, une petite partie littéraire d’où ils revinrent enchantés Je vois, parallèlement, la semaine qui précéda la mort de mon père, le dîner Balzac, organisé pour renouveler ces belles traditions : lui, Zola, Barrès, Anatole France, Bourget…. Ce fut cordial et charmant. Entre tant de sujets, on parla de la mort. Bourget rappela que Taine avait demandé pour ses derniers moments la lecture d’une page de Sainte-Beuve « afin d’entendre quelque chose de clair ». L’on constata aussi l’unanime admiration à l’égard du grand critique de Port-Royal et des Lundis.

Comme nous revenions en voiture, mon père, heureux et ému, me dit : « Ces agapes sont indispensables. Elles fouettent l’esprit, elles l’embellissent. Par les idées échangées, nous pénétrons réciproquement nos cervelles. Nous voyons le même fait, le même épisode apprécié de toutes façons d’après les caractères et les habitudes.