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LA VIE ORAGEUSE DE CLEMENCEAU

sible et à son abstention, de lui faire entendre. Dans les couloirs de la Chambre, on ne parlait que de cela. Les motifs de sa résolution nous échappaient. Personnellement, j’étais partisan — faute d’expérience — du rétablissement des relations avec le Vatican. Mais ce point de vue passait, à mes yeux, après le désir que j’avais de voir Clemenceau à la Présidence de la République. J’étais, là-dessus, en amical désaccord avec Maurras et nous résolûmes de défendre, chacun, notre position, dans le journal. J’avais beaucoup de sympathie personnelle pour le papa Groussau, mon collègue, mais son esprit politique me semblait médiocre et je pensais de même quant au général de Castelnau, chef admirable, collègue très sympathique, mais que les manières de Clemenceau et sa bougresse de philosophie évolutionniste rebutaient.

Paul Deschanel — que j’appelais autrefois Poldéchanelle — je le considérais, en politique, comme un zéro pointé. Ayant écrit, jadis, dans la Nouvelle Revue, un article aimable sur les souvenirs de son père Émile Deschanel, un vieux de la vieille, j’avais reçu sa visite avenue de l’Alma, où j’habitais alors, et je l’avais trouvé gentil, frétillant et nigaud. Quant à la question du Nonce, je suis aujourd’hui de l’avis de Clemenceau et j’estime, expérience faite, que l’habitation à Paris et l’introduction, dans nos milieux, d’un pareil personnage, ne saurait donner lieu qu’aux pires complications, et, pour l’opposition, qu’aux pires embêtements.

Un Nonce, à peine installé à Paris, n’a qu’une idée : composer avec les chefs du gouvernement républicain, de doctrine anticléricale, et, d’autre part, ne pas irriter à fond les ultramontains, les descendants des hommes du comte de Chambord,