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Page:Lévi - L’Inde civilisatrice, 1938.djvu/248

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à la recherche de la vérité suprême ; il se fait initier à la doctrine des Tantra et acquiert les formules magiques. À vingt-neuf ans, il entre au monastère d’Oṭantapurī au Magadha, s’engage dans les ordres ; il étudie le Yoga sous un moine de l’école Mahāsānghika. Il part ensuite au Suvarṇa-dvīpa, sur la côte orientale du golfe du Bengale, où il séjourne douze ans, revient au Magadha, s’installe au couvent de Vikramaçīla, la plus brillante université bouddhique de ce temps ; c’est là que les envoyés d’un prince tibétain viennent le solliciter de visiter leur pays ; il consent, et se met en route à l’âge de cinquante-neuf ans ; il passe par le Népal, y séjourne un an et y fonde un monastère ; de là, il se rend au Nga-ris, y enseigne la doctrine des Sūtra et celle des Tantra, y compose en sanscrit un ouvrage, le Bodhisattva-pathapradīpa « la lampe qui éclaire le chemin des Bodhisattva », qui est aussitôt traduit en tibétain ; puis il voyage à travers tout le Tibet, reçu comme une divinité par tous les princes de la contrée, et meurt enfin à l’âge de soixante-treize ans. L’église du Tibet le vénère comme un de ses trois grands saints, à l’égal de Nāgārjuna, tenu pour le fondateur du Grand Véhicule et de Tsong-kha-pa, le réformateur inspiré par Nāgārjuna. Il est le véritable ancêtre du système de théocratie auquel on donne encore le nom de lamaïsme, et que les empereurs mongols consacrèrent officiellement deux siècles plus tard ; sa secte, l’école Bka’-gdams-pa, avait reçu de lui la forte organisation hiérarchique qu’il avait apportée des couvents indiens. Ainsi le Tibet, qui avait reçu de l’Inde ses dieux et ses livres saints, dut encore à l’Inde le germe de l’organisation politique qui s’y est perpétuée jusqu’à présent.