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Page:Lévi - L’Inde civilisatrice, 1938.djvu/249

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Après Atīça, l’Inde cesse d’agir sur le Tibet ; absorbée dans sa lutte contre les Musulmans, qui atteignent le Bengale à l’aube du xiiie siècle, elle voit ses propres couvents pillés et détruits, ses moines massacrés, le bouddhisme anéanti. Mais, pendant ce même siècle, les empereurs mongols, protecteurs dévots de l’église tibétaine, ouvrent à son expansion un domaine qui déborde l’immense Asie. Aujourd’hui encore, de Pékin à la Volga, du Baïkal au Sikkim, bonzes et médecins étudient le traitement des âmes et des corps dans les livres tibétains, traduits ou inspirés d’originaux hindous.

Dans sa brusque expansion au cours du viie siècle, le Tibet avait rencontré dans l’Asie intérieure d’autres foyers de civilisation passés longtemps avant lui dans le rayonnement de la culture hindoue. Entre le Pamir à l’ouest, le Karakoroum, le Koun-loun et l’Altyn-Tagh au sud, le T’ien-chan au nord, l’Alachan et les sources du Houang-ho à l’est, s’étend un immense plateau désertique, sablonneux, plus isolé du monde que les plateaux tibétains eux-mêmes. Les fleuves du Tibet, nés sur le versant septentrional de l’Himalaya, réussissent à forcer de part et d’autre la muraille des montagnes et s’acheminent jusqu’à la mer des Indes, encadrant le continent indien entre l’Indus à l’ouest, le Brahmapoutre à l’est. Ici, un bassin fermé, un fleuve puissant, le Tarim, qui draine l’écoulement des plus hautes montagnes du globe, et qui va finir misérablement, épuisé par l’éponge des sables, dans les marais salés du Lob nor. Sur le cours supérieur des affluents qui forment le Tarim, vers le pied des montagnes, aux points où les torrents descendus des glaciers se métamorphosent en rivières, un chapelet d’oasis créées