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Page:Lévi - L’Inde civilisatrice, 1938.djvu/257

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commerce et la religion bouddhique, s’était répandu partout. Dans ces petites populations hétéroclites, on était polyglotte de naissance, l’instruction et la vie pratique enrichissaient encore le fonds natal. En 788, quand Wou-k’ong passe à Koutcha, le supérieur du Temple des Lotus « parlait avec une égale netteté les langues des Quatre Garnisons (Koutcha, Kachgar, Karachar et Khotan), et de l’Inde et de la Chine ». Un tel pays était marqué pour être le berceau d’interprètes et de traducteurs au service de la propagande politique et religieuse. Le plus grand des traducteurs qui ont fait passer les textes sacrés du bouddhisme indien en Chine, Kumārajīva (mort en 413) était, on l’a vu, originaire de Koutcha ; il avait complété son instruction dans les écoles de la frontière indienne (au Ki-pin, Cachemire) ; un siècle plus tôt, dès 291, un moine de Khotan, Wou-lo-tch’a, avait traduit en chinois la Prajñā-Pāramitā en 25 000 lignes. La version de l’immense compilation intitulée Avataṃsaka est due à deux moines khotanais, Çikṣānanda et Devendraprajñā (entre 689 et 700) ; un prince royal de Khotan, envoyé comme otage en Chine, y entre dans les ordres et traduit quatre ouvrages en 707. De Chine on venait dans les couvents sérindiens s’initier aux langues indiennes, à l’explication des textes sacrés dans leur forme originale ; on venait y chercher des manuscrits, en copier. Des légions de scribes s’occupaient à reproduire les ouvrages qu’on apportait de l’Inde ; les fouilles des vingt dernières années ont remis au jour les débris d’une immense littérature sanscrite : discipline monastique (Vinaya), grammaire (école du Kātantra), stances du Bouddha (Dharmapada, Udānavarga), hymnes (de Mātṛceṭa, etc.), sūtra des Anciennes Collections (Āgama)