Page:Lévy-Bruhl - L’Allemagne depuis Leibniz, 1907.djvu/118

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rience le prouve[1]. » Lui du moins ne s’y fie pas. Il se fait céder la Silésie par Marie-Thérèse en bonne et due forme ; il se fait même garantir par l’Angleterre, mais il estime cession et garantie à leur juste valeur. « Quant à la sûreté future de nos nouvelles possessions, je la fonde sur une bonne et nombreuse armée, un bon trésor, des forteresses redoutables et des alliances de parade[2]. » Ce dernier mot est significatif. Selon Frédéric II, les alliances, dépendant uniquement des intérêts, peuvent à tout moment être dissoutes, et les croire durables serait une grave imprudence. Il ne faut compter que sur soi. L’allié de ce matin sera votre ennemi ce soir, s’il y voit un avantage. Mais il n’en est pas moins utile de faire croire aux voisins qu’on a des alliés, et des alliés sûrs, puissants et redoutables : c’est ce que Frédéric appelle des alliances de parade. Il n’y en a pas d’autres. Les traités d’alliance valent les traités de paix.

Frédéric aime à goguenarder là-dessus. « Je connais trop la reine de Hongrie et le roi d’Angleterre pour jamais oser soupçonner qu’une chose aussi infâme, aussi noire, aussi perfide que celle de m’attaquer après les traités les plus solennels et après les garanties les plus inviolables, puisse leur venir en tête ; ainsi je me repose entièrement sur leurs serments comme ils pourront se reposer sur les miens[3]. » À bon entendeur, salut. En février 1744, Frédéric, alarmé des progrès de l’Autriche, se demande s’il va rentrer en campagne. « On m’objec-

  1. Corr. pol., I. 411.
  2. Ibid. à Podewils, 23 juin 1742.
  3. Ibid., II, p. 398.