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CHAPITRE V
L’INFLUENCE DE FRÉDÉRIC II SUR LES ESPRITS EN
ALLEMAGNE. — GELLERT. — KLOPSTOCK. — LESSING.


I


C’est fausser l’histoire, c’est la travestir même, que d’attribuer rétrospectivement à Frédéric II une « mission allemande », et d’interpréter son œuvre comme s’il avait eu conscience de cette mission et qu’il se fût efforcé de la remplir. Son but était la grandeur de l’État prussien. La direction générale de sa politique suivait les traditions de la maison de Brandebourg, et il ne s’inspirait en toutes choses que de ses propres intérêts. Il ne s’en est point caché, et là-dessus ses écrits comme ses actes témoignent avec une égale netteté.

Faut-il nier pour cela l’action profonde que Frédéric II a exercée sur les idées et sur les sentiments de l’Allemagne, sur son développement politique et littéraire, et en particulier sur la renaissance d’un sentiment national allemand ? Faut-il le nier pour cette raison que Frédéric II n’y songeait aucunement et poursuivait d’autres fins ? Mais l’histoire