Page:Lévy-Bruhl - L’Allemagne depuis Leibniz, 1907.djvu/37

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des découvertes de toute sorte, comme en France et en Angleterre. Mais à Dresde on ne l’écoute point ; les électeurs de Saxe ont bien d’autres manières de dépenser leur argent. À Vienne, Leibniz n’est pas plus heureux. À Berlin seulement, il réussira, sur la fin de sa vie, après des efforts incroyables. « Je travaille pour un établissement raisonnable de la Société des sciences, écrit-il en 1707 à l’électrice Sophie[1] ; cependant j’y ai trouvé autant de difficulté que si je négociais pour le pape. » Et encore l’Académie royale fut-elle inaugurée sans lui, qui l’avait fondée.

Le but que Leibniz se proposait ainsi était double : d’abord, aider au progrès des sciences et des arts en Allemagne, et mettre un terme à l’influence exercée par l’étranger, particulièrement par la France. L’attraction qui entraînait la jeune noblesse vers Paris paraissait irrésistible. Leibniz la jugeait funeste, et aurait voulu l’arrêter par tous les moyens. Les gouvernements, selon lui, devraient s’y opposer. Pourquoi permettre à un jeune noble de laisser en France sa fortune et souvent sa santé, pour n’en rapporter la plupart du temps qu’une suffisance ridicule et une prévention générale contre tout ce qui est allemand, ou pour en ramener une femme qui sera un des agents les plus actifs de l’influence française ? Les plus solides écrits politiques de Leibniz sont justement ceux où il gourmande cet injuste mépris des Allemands pour leur pairie, et où il vante en un énergique langage les vertus et la grandeur de l’Allemagne[2]. « L’Empire est un pays

  1. Klopp, IX, 280-2.
  2. Klopp, I, 193.